Utilisation des financements hybrides dans la structuration internationale

Examen des montages financiers combinant dette et quasi-fonds propres pour optimiser l’imposition des revenus d’intérêts

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Dans un contexte international marqué par une fiscalité de plus en plus rigoureuse et des exigences accrues en matière de transparence, les entreprises cherchent sans cesse à adapter leurs structures financières pour optimiser leur fiscalité. L’utilisation de financements hybrides constitue l’une de ces stratégies pointues, permettant de combiner des caractéristiques de la dette et des fonds propres (ou quasi-fonds propres) afin d’obtenir un traitement fiscal avantageux. Cet article se propose d’examiner les mécanismes sous-jacents à ces montages, leurs enjeux et les précautions à prendre pour répondre aux normes internationales tout en réduisant l’imposition des revenus d’intérêts.

1. Cadre conceptuel des financements hybrides
1.1. Qu’est-ce qu’un financement hybride ?

Un financement hybride est un montage financier qui combine des éléments de dette et de fonds propres. Il permet ainsi à une entreprise de bénéficier, d’une part, d’une déductibilité fiscale des charges d’intérêts (typique de la dette) et, d’autre part, d’une flexibilité dans la structuration du capital (proche des fonds propres). Cette dualité facilite l’optimisation fiscale en réduisant l’assiette imposable des revenus d’intérêts tout en maintenant une structure de financement solide.

1.2. Les instruments financiers hybrides et quasi-fonds propres

Les instruments hybrides peuvent prendre plusieurs formes, notamment :

  • Les obligations convertibles : initialement considérées comme de la dette, elles peuvent être converties en actions à une date future.

  • Les titres participatifs ou quasi-fonds propres : ils comportent des caractéristiques de dette (paiement d’intérêts) et de capitaux propres (participation aux bénéfices), permettant ainsi une flexibilité dans leur traitement fiscal.

  • Les prêts subordonnés : utilisés souvent dans le cadre de financements intragroupe, ils permettent de bénéficier d’un traitement avantageux en matière de déductibilité fiscale des intérêts.

Ces instruments hybrides se distinguent par leur capacité à être traités différemment selon les législations, ce qui ouvre la porte à des optimisations fiscales tant que la substance économique reste respectée.

2. Avantages et enjeux fiscaux des financements hybrides
2.1. Optimisation de l’imposition des revenus d’intérêts

L’un des principaux attraits des financements hybrides réside dans l’optimisation fiscale des revenus d’intérêts. Grâce à la déductibilité des charges d’intérêts associée à la dette, les entreprises peuvent réduire leur résultat imposable. Toutefois, en combinant cette dette avec des éléments de quasi-fonds propres, elles peuvent parfois structurer les paiements d’intérêts de manière à réduire l’imposition effective, sans compromettre la solidité de leur structure financière.

Exemple réel :
Plusieurs multinationales, telles qu’Apple et Starbucks, ont historiquement eu recours à des montages financiers hybrides – même si ces structures ont évolué sous la pression des réformes BEPS – afin de concentrer leurs revenus d’intérêts dans des juridictions à fiscalité avantageuse. Ces schémas, souvent complexes, permettent de minimiser la charge fiscale globale du groupe tout en respectant, à la forme, les exigences des normes internationales.

2.2. Flexibilité dans la structuration internationale

Les financements hybrides offrent une flexibilité considérable en matière de structuration internationale. En effet, ils permettent de :

  • Financer des opérations transfrontalières tout en adaptant la répartition des risques et des bénéfices.

  • Ajuster le mix de financement en fonction des conditions du marché et des exigences réglementaires locales.

  • Éviter les effets négatifs d’une sous-capitalisation (thin capitalization) qui pourraient remettre en cause la déductibilité des intérêts.

2.3. Répondre aux exigences internationales

Les normes internationales, telles que celles issues du projet BEPS de l’OCDE et du G20, visent à limiter les abus en matière d’optimisation fiscale. Dans ce contexte, l’utilisation de financements hybrides doit être soigneusement justifiée par une substance économique réelle. Les entreprises doivent :

  • Démontrer que les montages hybrides s’inscrivent dans une stratégie globale de gestion des risques financiers.

  • Maintenir une documentation exhaustive permettant de justifier le choix de la structure, en intégrant des analyses de comparabilité et des études de marché.

  • S’assurer que la structuration respecte les règles anti-abus, notamment en matière de déductibilité des charges d’intérêts.

3. Analyse pratique des montages hybrides
3.1. Structuration par dette subordonnée et quasi-fonds propres

Un montage classique consiste à recourir à un prêt subordonné émis par une filiale de la holding, combiné à une émission de titres participatifs. La dette subordonnée permet de bénéficier d’intérêts déductibles, tandis que les titres participatifs, qui ne nécessitent pas de remboursement immédiat, apportent une flexibilité dans la gestion du capital.

Exemple réel :
Starbucks a été cité dans plusieurs rapports pour avoir structuré son financement intragroupe en combinant des prêts subordonnés avec des titres hybrides. Cette approche a permis à Starbucks d’optimiser la déductibilité fiscale des intérêts tout en assurant une répartition équilibrée des risques au sein de son groupe.

3.2. Financements hybrides dans le cadre des restructurations internationales

Les restructurations d’entreprises internationales intègrent souvent des financements hybrides pour réorganiser la dette et le capital. Ces opérations peuvent inclure :

  • La création de structures intermédiaires dans des juridictions à fiscalité avantageuse.

  • L’utilisation d’emprunts intragroupe structurés de manière à profiter des règles de déductibilité des intérêts, tout en limitant le risque de requalification en quasi-dividendes par l’administration fiscale.

Exemple réel :
Certaines grandes multinationales du secteur technologique ont opté pour des restructurations intégrant des financements hybrides pour financer de nouvelles acquisitions ou des investissements stratégiques, tout en maîtrisant l’impact fiscal de ces opérations.

3.3. Risques et précautions

Bien que les financements hybrides offrent des avantages indéniables, ils comportent aussi des risques :

  • Risque de redressement fiscal : Les administrations fiscales, de plus en plus vigilantes, peuvent requalifier certains montages hybrides en abus de droit si elles estiment que la structure n’a pas de substance économique réelle.

  • Risque de double imposition ou de double non-imposition : Une mauvaise structuration peut entraîner des conflits entre différentes juridictions, augmentant le risque de redressements ou de litiges internationaux.

  • Complexité de la documentation : La justification des montages hybrides nécessite une documentation très détaillée, ce qui peut alourdir les coûts administratifs et juridiques.

Il est donc essentiel de travailler en étroite collaboration avec des experts en fiscalité internationale et en droit des sociétés pour concevoir des structures hybrides qui résistent aux contrôles fiscaux tout en restant optimales.

4. Perspectives et recommandations
4.1. Adaptation continue aux évolutions réglementaires

Les normes internationales et nationales évoluent en permanence pour limiter l’évasion fiscale. Les entreprises doivent donc adapter régulièrement leurs structures de financement hybrides pour rester conformes aux nouvelles règles, notamment celles issues du projet BEPS et des directives ATAD.

4.2. Importance de la transparence et de la documentation

La mise en place d’une documentation robuste est indispensable pour démontrer la substance économique des montages hybrides. Les entreprises doivent :

  • Mettre en œuvre des systèmes de reporting performants pour collecter et analyser les données financières.

  • Réaliser des études de comparabilité afin de justifier le niveau de déductibilité des intérêts.

  • S’assurer que la structure financière est cohérente avec les objectifs stratégiques et les exigences réglementaires.

4.3. Collaboration avec des experts spécialisés

Face à la complexité des financements hybrides, il est crucial de travailler avec des cabinets d’avocats et de conseil fiscal spécialisés en fiscalité internationale. Ces experts apportent une expertise pointue permettant de :

  • Concevoir des structures de financement adaptées aux besoins spécifiques de l’entreprise.

  • Anticiper et gérer les risques fiscaux liés aux contrôles et aux redressements.

  • Optimiser les montages financiers dans le respect des règles internationales.

Conclusion

Les financements hybrides constituent un levier puissant dans la structuration internationale des entreprises, offrant une opportunité d’optimisation fiscale significative tout en permettant une gestion flexible du capital. Cependant, leur utilisation requiert une attention particulière aux évolutions réglementaires, une documentation rigoureuse et une coordination étroite avec des experts en fiscalité internationale.

Pour Legal Growth, comprendre et maîtriser ces mécanismes est essentiel pour conseiller efficacement les entreprises multinationales. En adoptant une approche proactive et en s’appuyant sur une expertise technique pointue, les entreprises peuvent ainsi bénéficier d’un financement hybride optimisé, tout en assurant leur conformité aux normes internationales et en préservant leur compétitivité.

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